
Le Conservateur Boris Johnson est capable de remporter la mairie de Londres, ville traditionnellement travailliste. Comment expliquer cette révolution ?
Tony Travers : Sur le long terme, Londres est un baromètre de la Grande-Bretagne. Si les Tories gagnent dans la capitale, c'est un signe que le pays évolue vers le centre droit et que le Parti conservateur peut l'emporter au niveau national. C'est aussi un signe que Ken Livingstone, au bout de deux mandats, a fait son temps. Il n'est pas sans rappeler Jacques Chirac : par la durée de sa carrière politique, et par sa manière de zigzaguer. Il est passé de l'extrême gauche, proche de Chavez et admirateur de Castro, à des positions quasi thatchéristes. Il est acquis à la financiarisation de l'économie et opposé à l'impôt sur les résidents non domiciliés.
Dans le paysage politique britannique, Ken est une curiosité. Boris Johnson l'est aussi, par son excentricité volcanique et "upper class". Son message est le "changement". C'est bien trouvé, car les Britanniques se méfient des politiques qui restent trop longtemps au pouvoir. Lors des élections générales de 1945, ils avaient éconduit Churchill alors même qu'il était un héros.
Qui vote Boris Johnson ? Londres est une ville incroyablement diverse. Depuis une dizaine d'années y ont immigré un million de personnes nées hors du Royaume-Uni. 40 % des Londoniens sont nés à l'étranger, 35 % ne sont pas blancs, et ces minorités constituent l'une des bases électorales de Ken Livingstone.
C'est le problème de Johnson dans une ville progressiste comme Londres.